A god somewhere - Arcudi / Snejbjerg

Paru récemment chez Panini Comics, dans la collection Wildstorm, A god somewhere nous plonge dans l’habituelle découverte des super-pouvoirs d’un anonyme, mais cette fois d’un point de vue assez noir, dérangeant, différent. Qu’est-ce que devenir l’égal des dieux, telle semble être la question centrale de ce comic.

Eric Forster et Sam sont amis depuis le lycée. Leur amitié est née le jour où Sam, seul noir à des kilomètres à la ronde, fut sauvé d’un passage à tabac par les frangins Forster, blondinets un poil frimeurs. Hugh, le frangin en question, vient donc compléter ce trio de potes. 

Avec le temps, quelques fêlures apparaissent, dues aux aléas de l’existence, aux chemins pris. Pour ressouder tout ça, ils projettent un soir l’acquisition en commun d’un petit bateau sur lequel ils pourraient se retrouver tous ensemble. Mais c’est cette nuit-là qu’une explosion d’origine inconnue frappe l’immeuble d’Eric.

Les morts sont nombreux, la panique générale, mais Eric est simplement assis sur son lit, à ciel ouvert, indemne. Emmené à l’hôpital, les médecins s’aperçoivent que sa peau semble impénétrable. Pour Eric, transfiguré, tout est clair : il a acquis une forme de pouvoir surhumain. Capable de voler, doté d’une force herculéenne, il va de suite mettre à profit sa nouvelle condition pour sauver des rescapés des décombres, puis mettre un terme à un braquage meurtrier. Très vite il devient un héros. Très vite son comportement va changer…

John Arcudi s’est attaqué avec son scénario à une thématique très classique, vue sous un angle plutôt neuf (même s’il a forcément déjà été traité quelques fois, genre dans Irrécupérable de Mark Waid). Que provoquent la découverte et la prise de conscience de pouvoirs surnaturels ? Pas nécessairement cette humilité, cette volonté farouche de faire le bien. Ces pouvoirs ne l’améliorent pas, ne font pas de lui un homme plus intelligent, plus fort : ils le déshumanisent tout simplement, changent sa nature, et du coup sa façon de voir les choses.

Cette radicalité et cette absence de réponse claire à l’éternelle question de son ami Sam (« Pourquoi ? ») font beaucoup dans la réussite du récit. Même si, on doit bien l’avouer, la transformation psychologique d’Eric aurait pu être détaillée plus finement. Là on passe un peu vite d’un état à un autre, perdant au passage un peu en intensité dramatique.

Les dessins de Peter Snejbjerg sont réussis et n’évitent pas l’horreur. La transformation physique d’Eric qui accompagne son évolution psychologique est traitée habilement, dans une veine christique pas trop appuyée. De bons cadrages également.

A god somewhere vaut vraiment le détour, pour la justesse du propos, les questions que le récit soulève et auxquelles il ne répond pas totalement. Cette indécision, si elle peut avoir un côté frustrant pour le lecteur, est totalement cohérente avec le propos : nous sommes comme Sam, comprenant qu’Eric réagisse différemment, qu’il n’ait plus la même vision des choses, mais continuant tout de même à nous demander pourquoi ?.




Scénario : John Arcudi - Dessins : Peter Snejbjerg
Editeur : Panini Comics - Collection Vertigo - Récit complet.




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